Sur mes cahiers d'écolier, Sur mon pupitre et les arbres, Sur le sable de neige, J'écris ton nom
Sur les pages lues, Sur toutes les pages blanches, Pierre sang papier ou cendre, J'écris ton nom
Sur les images dorées, Sur les armes des guerriers, Sur la couronne des rois, J'écris ton nom
Sur les champs sur l'horizon, Sur les ailes des oiseaux, Et sur le moulin des ombres, J'écris ton nom
Sur chaque bouffée d'aurore, Sur la mer sur les bateaux, Sur la montagne démente, J'écris ton nom
Sur la mousse des nuages, Sur les sueurs de l'orage, Sur la pluie épaisse et fade, J'écris ton nom
Sur les sentiers éveillés, Sur les routes déployées, Sur les places qui débordent, J'écris ton nom
Sur la lampe qui s'allume, Sur la lampe qui s'éteint, Sur mes maisons réunies, J'écris ton nom
Sur toute chair accordée, Sur le front de mes amis, Sur chaque main qui se tend, J'écris ton nom
Sur l'absence sans désir, Sur la solitude nue, Sur les marches de la mort, J'écris ton nom
Sur la santé revenue, Sur le risque disparu, Sur l'espoir sans souvenir, J'écris ton nom
Et par le pouvoir d'un mot, Je recommence ma vie, Je suis né pour te connaître, Pour te nommer...
Liberté.
Chers vous tous,
Ce sont par ces quelques vers de Paul Eluard que je souhaitais vous accueillir en cette fin d'après midi. Je tiens à vous remercier de votre présence et je remercie chaleureusement Christian Vigne, Président de la Cave Coopérative de Massillargues-Atuech et son conseil d'administration d'avoir accepté que la banderole de soutien aux otages du Niger soit installée sur le terrain de la cave. En effet, cette banderole pourra flotter sur ce lieu visible par le plus grand nombre.
Soucieux de la devise républicaine installée au fronton de la Mairie « Liberté, égalité, fraternité », le conseil municipal de Massillargues-Atuech et moi même ne pouvions que répondre à l'interpellation du comité de soutien des otages du Niger et nous joindre à son action.
Depuis le 16 septembre 2010, Thierry Dol, Marc Féret, Daniel Larribe et Pierre Legrand, français, salariés d’Areva et Vinci enlevés sur leur lieu de travail à Arlit (Niger), sont retenus en otage par AQMI (Al-Qaïda au Maghreb Islamique).
Après plus de 31 mois, l’inquiétude ne cesse de grandir dans leur famille en raison de la guerre au Nord Mali et des conditions de détention particulièrement difficiles qui sont les leurs tant sur le plan physique que psychologique.
Libérés, Françoise Larribe, et deux autres compagnons Jean-Claude Rakotorilalao et Alex Kodjo faisaient partie du groupe des sept otages enlevés sur le site d'extraction d'uranium d'Arlit.
Je me permets d'emprunter les mots de Françoise Larribe, en entretien, ces mots sur la gestion du temps exprime de manière émouvante le quotidien des otages : « Quand on est en France, dans la “vraie vie”, on se dit “je vais gérer mon planning”, “je vais faire telle ou telle chose”, “je vais me projeter”. On a l’illusion de gérer son temps. Là-bas, “de l’autre côté”, comme je dis, c’est le temps qui vous gère. On est complètement soumis aux journées qui passent, aux heures, aux minutes, sans échéance. C’est très troublant. On ne peut pas se projeter, on ne sait pas comment et quand on va sortir, on ne sait pas ce qui va nous arriver le lendemain. Une journée dure des années. »
Ces journées, Françoise et Daniel Larribe essayaient de les structurer quand il était réuni dans leur prison à ciel ouvert : « Daniel avait planté un bâton pour essayer de faire un cadran solaire. Entre chaque moment donné, il fallait que l’on fasse telle ou telle chose. Chaque matin, on s’obligeait aussi à dire “on est tel jour”. On n’a jamais perdu la notion du temps. Daniel mémorisait tous les événements qui nous arrivaient, et je pense qu’il a continué à le faire, avec des pierres et des cailloux différents. Un caillou noir pouvait représenter telle chose. On essayait de faire des jeux de mémoire. On n’avait rien, pas de livres, rien pour écrire. Je faisais bien des dessins sur du sable, mais c’était de l’art éphémère. » Plus loin dans l'entretien, Françoise Larribe exprime la résistance dont elle fait preuve aujourd'hui comme elle pouvait le faire dans le désert. « D’une façon différente, reprend-elle. On n’a pas le choix. On n’a que le choix d’avancer. Parce que c’est la vie. Je me rappelle ce que nous disait un professeur : “La vie c’est faire du vélo sur un fil tendu. Il faut avancer, sinon on se casse la figure.” »
Forts de ces paroles, nous allons continuer, Madame Larribe, à avancer chaque jour un peu plus vers la liberté, c'est notre espoir le plus fort à nous tous, continuer à résister, à résister au doute, à l'angoisse, à la peur. J'ose espérer que cette cérémonie d'aujourd'hui à Massillargues-Atuech soit un moment de soutien pour l'ensemble des familles des otages retenus au Sahel mais aussi à tous les otages retenus dans le monde. A ce moment, j'ai une pensée pour la famille Moulin-Fournier libérée le 20 avril dernier en espérant que cette libération en annonce de nombreuses autres.
Aujourd'hui, souhaitons que notre présence, que toutes ces banderoles déployées dans les grandes villes ou les petits villages, que nos paroles, que nos discours, que nos soutiens aux otages et à leur famille traversent les continents jusqu'auprès de Thierry, Marc, Daniel et Pierre et les aident à résister, à supporter leur captivité. Cette banderole restera accrochée, ici, jusqu'à la libération des otages que nous espérons tous très proche.
Pour terminer, je crierai juste « Qu'ils retrouvent la liberté »...
Merci