LE POUVOIR DES FLEURS... COMMEMORATION 11 NOVEMBRE 2025
Aujourd’hui,
comme chaque année, nous sommes réunis dans le calme de ce lieu
chargé d’histoire, devant ce monument aux morts qui veille sur la
mémoire de nos aînés.
Le 11 novembre 1918, à onze heures, les
canons se sont tus.
Les armes se sont enfin abaissées et après
plus de quatre années d’une guerre inhumaine, le silence est enfin
revenu sur les champs de bataille. Un silence lourd de deuils, de
blessures,
de larmes mais aussi… d’espérance.
La guerre la
plus meurtrière qu’ait connue l’Europe s’achevait, laissant
derrière elle des millions de morts, de blessés, de familles
détruites, de villages dévastés… et un monde à reconstruire.
Dans de très nombreuses communes, les cloches ont sonné, sans doute pas ici, à Massillargues-Atuech mais à Massillargues-Atuech comme ailleurs, les gens se sont embrassés mais beaucoup pleuraient. Ici, à Massillargues-Atuech, comme partout en France, on a pleuré des fils, des frères, des pères. On a gravé leurs noms sur la pierre, et chaque année, on les fait revivre par nos mots, par nos gestes, par notre présence.
Car
ces noms, ces simples noms inscrits ici, ne sont pas des lettres
gravées dans la pierre.
Ce sont des vies. Des visages. Des
promesses interrompues.
Et
si nous venons ici, ce n’est pas seulement pour nous souvenir —
c’est aussi pour comprendre. Comprendre que la paix, la liberté et
la fraternité ne sont jamais acquises.
Et depuis plus d’un
siècle, nous venons, génération après génération, redire notre
reconnaissance à ces hommes, ces enfants parfois, qui ont donné
leur vie pour que la France demeure libre.
Mais
commémorer, ce n’est pas seulement regarder en arrière.
C’est
interroger le présent, comprendre ce que ces drames disent encore à
nos consciences d’aujourd’hui. C’est Interroger le présent et
se poser la question : qu’avons-nous appris ?
Car
les racines de la guerre, de la violence, des racismes, de
l’antisémitisme, du terrorisme, plongent toutes dans le même sol
: celui de la peur. La peur de l’Autre. La peur de ce que l’on ne
connaît pas. La peur de ce que l’on ne comprend pas. La peur de la
différence, de la diversité, de l’inconnu. C’est cette peur-là
qui, hier comme aujourd’hui, nourrit les idéologies du rejet, du
fanatisme et de la haine.
C’est
elle, cette peur qui a dressé les peuples les uns contre les autres
en 1914, en 1939 comme elle a dressé des jeunes gens égarés contre
leur propre pays en 2015. En effet, il y a dix ans, presque jour pour
jour, la France était à nouveau plongée dans la stupeur et dans
les larmes.
Le 13 novembre 2015, des hommes armés ont pris pour
cible ce que nous avons de plus beau : la jeunesse, la fête, la
musique, la liberté et la joie de vivre ensemble.
Au Bataclan,
dans les rues de Paris, sur les terrasses des cafés, la même
barbarie s’est abattue que celle qui, cent ans plus tôt, fauchait
les vies dans les tranchées : celle qui nie la dignité humaine,
celle qui ne supporte pas la Liberté. Dix ans déjà… Et pourtant,
ces visages, ces prénoms, ces destins brisés sont encore présents
dans nos mémoires.
Parce qu’ils nous rappellent, eux aussi, que
la paix n’est jamais acquise.
Qu’elle se mérite, qu’elle se
cultive, chaque jour, par le respect, la tolérance et la fraternité.
Cent ans après la Grande Guerre, la même ombre revenait : celle de
la haine.
Celle qui tue sans raison.
Celle qui nie la
dignité humaine. Mais, ce soir-là aussi, la France s’est
relevée.
Dans la douleur, mais debout. Unie. Et fière...
Ces deux drames — 1918 et 2015 — semblent si éloignés,et pourtant, ils nous parlent de la même chose : de la nécessité, vitale, de ne jamais laisser la peur décider à notre place. Car la paix n’est pas un état. C’est un combat, un choix, un effort permanent. Et ce combat, il commence ici. Dans nos villages. Dans nos familles. Dans nos écoles. Dans la façon dont nous parlons, dont nous écoutons, dont nous nous regardons.
C’est
ici, à Massillargues-Atuech, que la fraternité prend racine. Dans
un salut, un sourire, un geste de solidarité.
Il est de notre
devoir, à nous, élus, citoyens, parents, enseignants, de
transmettre cela.
De transmettre cette idée simple et forte :
“L’Autre n’est pas une menace, il est une richesse.”
Nos
différences ne sont pas des murs, mais des ponts.
Et je crois
profondément que c’est dans des villages comme le nôtre, dans des
communes à taille humaine, que cette fraternité peut continuer de
grandir.
Ici, on se connaît, on se parle, on s’engueule, on
s’écoute tout de même et on essaie de se comprendre.
Et c’est
cela, la République vivante : pas un mot dans un livre d’histoire,
mais un visage, une main tendue, un regard bienveillant.
Permettez-moi,
en ce jour si symbolique, de partager quelques paroles d’une
chanson de Laurent Voulzy, écrite il y a déjà plusieurs décennies,
mais dont la résonance n’a jamais été aussi actuelle : “Changer
les âmes, changer les cœurs Avec des bouquets de fleurs,
La
guerre au vent, l’amour devant, Grâce à des fleurs des champs.”
Oui,
changer les âmes et les cœurs. Voilà sans doute la mission la plus
difficile, mais aussi la plus noble, que nous ayons reçue en
héritage.
Et c’est à nous, aujourd’hui, de l’accomplir.
Changer les âmes, changer les cœurs…
Voilà le défi de notre
temps.
Voilà, peut-être, le plus beau défi de notre temps, à
nous, à nos enfants et petits enfants :
refuser la peur,
refuser la haine et préférer toujours le dialogue, le respect, la
tendresse humaine.
C’est avec une émotion particulière que
je prends la parole aujourd’hui, car il s’agit de la dernière
fois que je le fais en tant que Maire lors de ce mandat.
Depuis
ces années de mandat, j’ai mesuré, chaque jour, la force
tranquille de notre commune, sa capacité à unir au lieu de diviser,
à bâtir au lieu de détruire. Je veux vous dire, du fond du cœur,
merci.
Merci pour votre présence nouvelle ou ancienne et de votre
engagement à faire vivre ici les valeurs de la République :
Liberté, Égalité, Fraternité. Ces mots gravés sur nos frontons
ne doivent pas devenir des formules. Ils doivent rester des
actes.
Car tant que nous ferons vivre ces valeurs, la paix aura un
avenir.
Je
l’ai souvent dit mais je le ressens profondément aujourd’hui :
une commune, ce n’est pas seulement un territoire, c’est une
communauté de destins.
C’est un lien vivant, tissé entre des
gens différents, unis par une même volonté : celle de construire
ensemble. Et en pensant à ceux de 1918, à ceux de 2015, et à tous
ceux qui ont cru en un monde meilleur, faisons, ici, aujourd’hui,
le serment de faire reculer la peur par l’écoute, la haine par la
parole, et la violence par la solidarité.
Souvenons-nous, à
chaque instant, que la paix ne se décrète pas, elle se construit
ensemble — patiemment, humblement, humainement. Et qu’ici, à
Massillargues-Atuech, comme dans toute la France, nous avons ce
pouvoir-là : celui des fleurs, celui du cœur, celui de la
fraternité.
En
souvenir aux soldats tombés pour la France, en souvenir des
innocents fauchés en 2015, en mémoire aux victimes des attentats en
France, en Europe et dans le Monde, en souvenir des victimes de
drames, de génocides d’hier et d’aujourd’hui, en mémoire à
tous les Morts pour la France,
Souvenons-nous de tous ceux qui ont
choisi l’amour, la fraternité, la vie parfois au détriment de la
leur, je vous demande une minute de silence.
Vive
la République, Vive la France, Et vive la Paix.