Bienvenue sur mon blog!

Élue maire depuis 2 ans le 14 mars 2010, j'ai eu envie de raconter cette aventure sur un blog.
Certains autres Maires ont leur blog alors je me suis dit: Pourquoi pas moi? Voilà, c'est fait: j'attends vos commentaires, vos impressions et tout et tout...

En effet, c'est une véritable aventure que je vis depuis 2008! Une aventure humaine incroyable et une aventure personnelle passionnante!

dimanche 11 novembre 2012

Mon discours du 11 novembre


Quand au bout de huit jours, le repos terminé
On va reprendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile,
Mais c'est bien fini, on en a assez
Personne ne veut plus marcher,
Et le cœur bien gros comme dans un sanglot
On dit adieu aux civelots,
Même sans tambours, même sans trompettes
On s'en va là-haut, en baissant la tête.
Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes
C'est bien fini, c'est pour toujours,
De cette guerre infâme,
C'est à Craonne, sur le plateau
Qu'on doit laisser sa peau,
Car nous sommes tous condamnés,
Nous sommes les sacrifiés.

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrances,
Pourtant on a l'espérance,
Que ce soir viendra la relève
Que nous attendons sans trêve.
Soudain dans la nuit et dans le silence
On voit quelqu'un qui s'avance,
C'est un officier, un chasseur à pied
Qui vient pour nous remplacer.
Doucement dans l'ombre sous la pluie qui tombe,
Les petits chasseurs vont chercher leur tombe.

C'est malheureux de voir sur les grands boulevards
Tous ces gros qui font la foire
Si, pour eux la vie est rose,
Pour nous c'est pas la même chose.
Au lieu de se cacher, tous ces embusqués
Feraient mieux de monter aux tranchées
Pour défendre leur bien car nous n'avons rien
Nous autres, les pauvres purotins
Tous les camarades sont enterrés là
Pour défendre les biens de ces messieurs là.

Ceux qu'on le pognon, ceux-là reviendront
Car c'est pour eux qu'on crève.
Mais c'est fini, car les troufions
Vont tous se mettre en grève.
Ce sera votre tour, messieurs les gros
De monter sur le plateau,
Car si vous voulez la guerre
Payez-là de votre peau !

En ce 11 novembre 2012, ce sont par ces paroles touchantes, émouvantes et dures que je voulais débuter mon discours commémorant la fin de la guerre 14-18. Cette guerre appelée Grande Guerre par sa durée et le nombre de victimes qu'elle a faite. Il est toujours bon, 94 ans après de rappeler le terrible bilan de cette guerre : dans le monde, 9 millions de morts, 6 millions de mutilés. Pour la France: 1 400 000 morts, dont 600 000 victimes civiles ; 630 000 veuves et 700 000 orphelins de guerre.

Les paroles que je vous ai lues tout à l'heure sont celles de la Chanson de Craonne, une des plus célèbres chansons composées par les poilus au cours des mutineries de 1917. L'offensive de Nivelle s'était terminée par un massacre au Chemin de dames avec 147.000 tués et 100.000 blessés en deux semaines... Cette guerre durait, durait pour les soldats sur le front, constatant à chaque attaque le terrible bilan de morts et de blessés qui en résultaient. Pourquoi ? Pour qui ? Ces mots interrogatifs revenaient sans cesse dans la tête de ces hommes ayant délaissés trop jeunes, leurs mères, leurs femmes et leurs familles. Le moral était au plus bas, et certains régiments refusèrent de monter en ligne. Des mutineries sont constatées dans près de soixante divisions, sur les cent que comptaient l'armée française. Pétain est appelé pour rétablir la situation, et il réprima sévèrement les refus d'obéissance. Il y eut plus de 500 condamnations à mort, mais beaucoup moins furent exécutées...
Cette chanson fut bien sûr interdite, et on promit même une récompense à celui qui dénoncerait son auteur: un million de franc-or et la démobilisation immédiate! Mais aucun poilu n'eût la lâcheté de dénoncer un camarade, ce qui prouve qu'au milieu de tant de détresse et de désespoir, la solidarité n'était pas un vain mot.

C'est ceci qui m'a incité à vous livrer ce texte. Imaginez que dans tant d'horreur, tant de sang, ces hommes aient pu garder en eux des valeurs fortes, justes est impensable aujourd'hui, me semble t-il. La solidarité, haute valeur humaine me fait penser à la liberté de conscience, que nous continuons tous à défendre en particulier sur notre territoire qui a connu tant d'oppressions pour des combats justes, loyaux, la défense de sa religion, la défense de penser différemment des autres.

En effet, aujourd’hui, en ce 11 novembre 2012, alors que presque tous les témoins de cette tragédie ont disparu, alors qu’en France le dernier soldat survivant de cette guerre atroce n’est plus, alors que les haines se sont éteintes, que l’esprit de revanche semble avoir disparu, que nul parmi ceux qui se sont tant combattus ne songe plus à dominer l’autre, le temps est venu d’honorer tous les morts…

Je pense aussi à ceux qui n’ont pas tenu, à ceux qui n’ont pas résisté à la pression trop forte, à l’horreur trop grande et qui un jour, après tant de courage, tant d’héroïsme sont restés paralysés au moment de monter à l’assaut. Je pense à ces hommes dont on avait trop exigé, qu’on avait trop exposés, que parfois des fautes de commandement avaient envoyés au massacre et qui un jour n’ont plus eu la force de se battre.

Cette guerre totale excluait toute indulgence, toute faiblesse. Mais 94 ans après la fin de la guerre, il faut reconnaître que beaucoup de ceux qui furent exécutés alors ne s’étaient pas déshonorés, n’avaient pas été des lâches, mais que simplement ils étaient allés jusqu’à l’extrême limite de leurs forces.

Je veux dire que la souffrance de leurs épouses, de leurs enfants fut aussi émouvante que la souffrance de toutes les veuves et de tous les orphelins de cette guerre impitoyable. Souvenons-nous qu’ils étaient des hommes comme nous avec leurs forces et leurs faiblesses. Souvenons-nous qu’ils auraient pu être nos enfants. Souvenons-nous qu’ils auraient pu être nos pères. Souvenons-nous qu’ils furent aussi les victimes d’une fatalité qui dévora tant d'hommes qui n’étaient pas préparés à une telle épreuve. Mais qui aurait pu l’être ?

Comme le dit Kader Arif, Ministre délégué auprès du Ministre de la Défense, en charge des anciens combattants, « la Loi du 28 février 2012 qui élargit la portée du 11 novembre à l'ensemble des morts pour la France est la reconnaissance du pays tout entier à l'ensemble des Morts pour la France tombées pendant et durant la Grande Guerre qui devait être la Der der Der qui s'exprime aujourd'hui, mais aussi ceux qui ont laissé leur vie en Afghanistan. Cette loi s'inscrit dans une politique commémorative ambitieuse qui vise à transmettre la mémoire , à favoriser la compréhension de notre histoire nationale commune et son appropriation par les jeunes générations . Les parlementaires du début des années 20 avaient voulu que la journée nationale du 11 novembre soit placé sous le double signe de la victoire et de la Paix. Ce dernier but semblait alors bien aléatoire comme allaient le démontrer les décennies suivantes. Mais finalement, ces parlementaires étaient des précurseurs. En votant la loi instituant une « Journée de la victoire et de la paix », ils espéraient que soit célébrée dans l'avenir une « Journée de la Victoire et de la Paix ». Le temps et la volonté des peuples leur ont donné raison. »

C'est pourquoi, à la mémoire de l'ensemble des Morts pour la France, depuis la Grande Guerre jusqu'à aujourd'hui, sur tous les fronts du Monde, à la mémoire des fusillés pour l'exemple qui ont le droit d'être aujourd'hui réhabilités, à la mémoire des deux pompiers récemment morts à Digne les Bains pour sauver la vie d'une famille, à la mémoire de ces soldats du feu, de ces soldats de l'eau qui, à chaque intempérie risquent leur vie pour celle des autres, à la mémoire de ces mères, de ces pères, de ses époux et épouses, de ses enfants qui ont perdu dans de nombreuses luttes un être cher, je vous demande de respecter une minute de silence.

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